ELEVAGE, CARACTERE, COMPORTEMENT ET REPRODUCTION :
une poule indépendante !


"On n'a jamais vu une poule landaise se faire caresser", se plaît à dire René Jourdan. La poule landaise est une poule libre, indépendante, au caractère très vif. Certes, c'est un animal domestique, mais à la limite du sauvage, exactement comme la décrivaient les anciens. Le plus surprenant, c'est qu'en retrouvant le phénotype landais, on retrouve également le caractère de cette poule tel qu'il a été décrit par l'abbé Dubourdieu, au début du 20ème siècle.

Une poule farouche, à la limite du sauvage

La poule landaise est, avant tout, une poule farouche, méfiante et fuyante. Impossible de l'approcher de trop près, elle détalle ! Son comportement se rapproche de celui de la pintade. S'il vous sera possible de réduire cette distance de fuite en la nourrissant régulièrement vous-même, le moindre geste brusque provoquera des mouvements de panique dans le groupe. Petit à petit, avec beaucoup de patience, vous obtiendrez une certaine proximité. Rien de plus ! Le coq dominant qui surveille systématiquement les environs signalera toute tentative d'approche. La poule landaise ne s'apprivoise jamais totalement ! Il faudra vous y faire ou renoncer à l'élever.
On aurait pu penser qu'en reconstituant la race, on ne retrouverait pas forcément son caractère. Il n'en est rien ! "Cette variété est vive, alerte, vit dans les bois, perche sur les arbres, est presque aussi rusée que le renard et n'hésite pas, pour lui échapper, à s'envoler comme un faisant, sur les cimes des pins", expliquait Marcel Dubourdieu. Rien n'a changé sous le soleil des Landes ! Inutile de penser confiner des Landaises dans un poulailler clos. Les grillages de plus de deux mètres ne constitueront jamais un obstacle à leur soif de liberté. Même avec les rémiges primaires (bout des ailes) raccourcies nos poules ont réussi à s'envoler jusqu'au sommet des arbres qui ombragent leur parc. Il leur suffit de très peu d'élan pour franchir les clôtures les plus élevées.
Dominique Massoubre, de la Ferme conservatoire du Leyssart, a eu des poules qui avaient pris l'habitude d'aller se percher, dans une grange, sur une poutre de sept à huit mètres de haut en prenant appui sur les murs et un plafond situé à mi-hauteur. Autant dire que si vous souhaitez conserver vos landaises dans leur poulailler, il conviendra d'utiliser un filet. Mais le plus sage est certainement de se faire une raison et d'admettre que la poule landaise ne s'enferme pas, qu'elle est faite pour vivre en liberté !

Un goût prononcé pour l'indépendance

Cette indépendance se manifeste également par des parcours assez longs et éloignés de la ferme. La Landaise a une prédilection pour les taillis et fourrés où elle passe le plus clair de son temps à gratter le sol à la recherche de nourriture. Si l'environnement de votre habitation lui offre une telle possibilité, vous ne la verrez pas souvent autour des bâtiments en espace découvert, si ce n'est en fin d'après-midi quand le soleil décline.
"Le soir, toute la gent ailée regagne la ferme, et vous la verriez alors s'envoler sur les branches des arbres qui avoisinent la maison ou les étables, poursuit Dubourdieu. Là, hiver comme été, elle passera la nuit à la belle étoile, balancée par le vent, mouillée par la pluie ou couverte par la neige, peu lui importe. Elle aperçoit parfois maître renard qui vient au pied du poulailler aérien tenter un mauvais coup. Mais là-haut tout le monde dort et reste sourd à ses discours".
Bien évidemment, le comportement n'est pas uniforme et, au sein d'un groupe, il y a des individualités parfois très fortes.
Nos Landaises regagnent majoritairement le poulailler, à l'exception de quelques-unes, plus rustiques encore, qui ont choisi de coucher dans un prunier et qui s'y installent systématiquement quelles que soient les conditions météorologiques. Elles n'en retrouvent pas moins le chemin du poulailler et du distributeur de nourriture quand elles ont un petit creux. La poule landaise impose son mode de vie !


Là, elle passera la nuit à la belle étoile, balancée par le vent ...

Une poule de caractère

Seul véritable inconvénient à ce trait de caractère fruste : la quête des œufs qui en sera un peu compliquée. Vous les retrouverez dans les nichoirs aménagés dans le poulailler, mais également dans des nids disséminés tout autour de la maison, jamais très loin, de préférence dans les granges, les meules de paille, le foin des râteliers, cachés sous un tas de bois, dans des fourrés, toujours parfaitement dissimulés.
Attention à ne rien changer à l'environnement de ces nids sauvages : la poule risque de déménager ! Ainsi, à force de couper du bois, le tas s'amenuisant, nous avons fini par retrouver un nid de Landaise. Malgré nos précautions (nous l'avons caché sous des planches et nous avons laissé un œuf), la poule n'y a plus jamais pondu !
Si vous devez rechercher un nouveau nid, vous devez savoir qu'il ne faudra pas compter sur le chant de la cocotte qui vient de pondre. Contrairement à bien des poules qui ameutent le quartier avant de rejoindre le groupe, la Landaise reste relativement discrète.
Paradoxalement, nous avons constaté que notre poule la plus sauvage et la plus indépendante (une de celles qui ont choisi de nicher dans les arbres) pond le plus conventionnellement du monde dans le poulailler.
A ce propos nous avons observé que le coq indique souvent à la poule l'endroit où faire son nid (quand il n'est pas déjà préfabriqué) et pondre. Il rentre dans le nichoir ou les broussailles, imite la clouque* qui appelle ses petits en grattant le sol et simulant une découverte de nourriture. On notera qu'il utilise le même stratagème pour rassembler sa troupe, voire pour attirer à lui ses compagnes les plus récalcitrantes et assouvir sa libido !
Autre inconvénient : liberté ne rime pas avec sécurité. Gare au renard, même si sa légèreté, son agilité et sa vivacité, sa capacité à s'envoler à la cime des arbres, lui permettront effectivement de déjouer (hélas, pas toujours, notamment au printemps quand il doit nourrir ses petits !) les manœuvres de Maître Goupil !


Un poule fuyante, toujours prête à détaller !

Alimentation

Dans les fermes landaises, compte tenu de sa capacité à trouver sa nourriture, mais également des maigres récoltes, on ne distribuait à la volaille que quelques poignées de maïs, de sarrasin, de seigle ou de millet. Pour le reste, la poule landaise se nourrissait, telle le gibier, de vers, d'insectes et de fruits sauvages qui lui donnaient, selon Dubourdieu, "ce goût spécial, cette saveur particulière rappelant à s'y méprendre, celle de la pintade, une vagabonde aussi". De nos jours -surtout si elle vit en liberté- la Landaise reste une petite mangeuse capable de trouver, dans la nature, une bonne part de son alimentation. C'est une poule économe, peu exigeante. La poule landaise n'est pas une poule de luxe !

Ponte et reproduction

L'abbé Dubourdieu la qualifie de "machine à œufs". Sur quatre poules observées une année entière, la première a pondu 286 œufs, la seconde et la troisième (elles pondaient dans le même nid) : 613 œufs (soit une moyenne de 306.5 œufs), la quatrième 220 (mais elle en dérobait pas mal). C'est donc une bonne pondeuse.
C'est aussi une bonne couveuse (sauf la première année) si l'environnement lui convient et dans la mesure où elle bénéficie de l'indispensable liberté à laquelle elle aspire.
"Elle couve assez facilement, note Dubourdieu, sans exagération cependant ; elle mène sa couvée avec une sollicitude comparable à celle de la perdrix ; défend ses poussins avec un courage étonnant et, quand ceux-ci ont six à sept semaines, elle se remet à pondre tout en continuant à les conduire".
Le seul problème résidera une fois de plus dans le caractère indépendant (pour ne pas dire sauvage) de cette poule qui fait souvent son nid bien à l'abri du regard et non dans les endroits que vous avez aménagés à cet effet dans le poulailler. Mais l'abbé Dubourdieu relève que ces poules trouvent le moyen, "malgré les bêtes puantes, de réussir quatre fois sur cinq, à ramener à la ferme une nichée de poussins couvés dans quelques buissons". Une poule très protectrice, des poussins particulièrement vifs, vigoureux et débrouillards : la poule landaise est une bonne reproductrice !

Plaidoyer pour une landaise !

La poule landaise n'est pas sans défauts, loin s'en faut. Mais elle est parfaitement adaptée à l'airial landais et à la vie en liberté. Elle séduira par sa débrouillardise et sa capacité à se tirer d'affaire toute seule, le cas échant ! C'est la poule idéale pour les résidences secondaires dont elle égaiera les pelouses, se passant allègrement des fermiers, vaquant librement à ses occupations, poursuivant les sauterelles l'été, traquant les vers et les larves l'hiver, déparasitant consciencieusement son terrain, chassant jusqu'aux souris qui s'aventurent un peu trop longuement dans les mangeoires.
C'est une poule de terroir, originale, vraie, authentique ! Une poule dont le fumet sauvage égaiera enfin le repas dominical, avec cette saveur incomparable héritée d'une alimentation de " vagabonde ". Surtout si vous lui offrez une fin digne d'une landaise : au pot pour la vieille poule, en la laissant longuement mitonner pour qu'elle puisse libérer tous ses sucs, au tournebroche "capucin" et au feu de bois, sur la lèchefrite, dans la cheminée, pour un poulet bien doré et croustillant !

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© Joël HERREROS
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NOUVEAU !

Les premiers pas d'un poussin landais (album-photo)


Poulailler typique landais (Ecomusée de Marquèze)


ASTUCES

A propos de renard, j'ai résolu définitivement le problème en entourant la grille de notre poulailler d'une double clôture électrique au ras du sol, puis à 20 cm environ de hauteur.

Le dispositif est complété par un portier électronique (ouverture et fermeture commandées par cellule photoélectrique au lever et coucher du soleil, ou par programmateur spécifique).



HISTOIRE D'ŒUFS !

De la même façon qu'il y a des poules "pondeuses" et des poules "couveuses", il y a des poules élevées pour leur chair et d'autres pour la ponte.
On estime qu'une poule pondeuse pond entre 280 et 300 œufs par an. Mais cette moyenne s'est considérablement accrue au point de doubler ces cinquante dernières années, notamment grâce à une meilleure nutrition. On peut considérer que les chiffres donnés par l'abbé Dubourdieu (280 à 300 œufs par an) situent la Landaise parmi les bonnes pondeuses. Hélas, privée de liberté, ses performances de couveuse sont limitées. En revanche, c'est aussi une excellente poule de chair.

Les œufs de landaise ont un poids de 50g à 60 g.
Le poids moyen de l'œuf de poule est de 60 grammes. Dans le commerce, les œufs sont classés de la façon suivante :
- XL, très gros : 73g au moins
- L, gros : de 63 à 73g exclu
- M, moyen : de 53 à 63g exclu
- S, petit : moins de 53g


ALIMENTATION

Une alimentation essentiellement composée de maïs accentuera la couleur jaune des oreillons, des pattes et du jaune de l'œuf, mais cette céréale a tendance à faire grossir les poules et à limiter la ponte.
Une poule landaise élevée en liberté doit pourvoir bénéficier d'un distributeur de céréales (blé) et d'eau à volonté. Elle trouvera toute seule les compléments indispensable à son alimentation (verdure, vers, insectes). Au besoin, distribuez des coquilles d'huîtres broyées pour obtenir des œufs moins fragiles.


Abreuvoir


Mangeoires anti-gaspillage (la nourriture n'est pas accessible aux oiseaux, rats, souris). Très pratique et économique !



Poussins landais de deux jours


Notes

* Clouque : poule couveuse, cloca en gascon