Origines de la poule landaise :
une énigme gasconne !

Il semble bien que toutes nos races de poules soient originaires d'Asie du Sud-Est et qu'elles aient été dispersées dans le reste du monde par les grands flux migratoires et, surtout, les échanges commerciaux. On la retrouve en Egypte au premier millénaire avant J.-C, en Grèce vers le sixième siècle avant J.-C, puis en à Rome où elle est décrite par Varron et Columelle.
Outre les variations dues à des mutations et des adaptations à l'environnement, les 150 races de poules que nous connaissons aujourd'hui sont le résultat d'un travail de sélection mené sur des types génétiques précis à partir de trois grands types de base, mais plus particulièrement du type "Bankiva" ou coq sauvage doré, originaire de Java.
Vers le milieu du 18ème siècle, ce type de poules plutôt légères et agiles est amélioré par un apport de type "Cochin" (poules asiatiques plus grandes et plus lourdes). Ce mélange donnera dans la deuxième moitié du siècle la Sussex et l'Orpington en Angleterre, la Leghorn en Italie. C'est à partir de ce pays que la poule baptisée "Leghorn" par les Américains (Leghorn est le nom anglais du port de Livourne d'où était exportées les volailles) a conquis l'Europe, puis le Nouveau Monde, avant de devenir, aux USA, le point de départ de la plupart des sélections hybrides commerciales actuelles qui, à leur tour, on envahit l'Europe et le monde entier à la fin de la seconde guerre mondiale.
Dans les années cinquante à soixante, on assiste à une séparation entre l'élevage commercial et l'élevage des races pures. Le premier, parce qu'il répondait exclusivement à des critères de productivité, s'est cantonné dans l'utilisation de poules hybrides standardisées et uniformisées, aux performances plus élevées, tandis que le second s'est consacré au maintien de la diversité génétique et à la sélection sur des particularités phénotypiques. L'industrialisation de l'élevage a entraîné la désaffection de nombreuses races locales comme la poule landaise, au profit des races les plus productives.

Une hypothèse séduisante

L'histoire de la poule landaise se perd certainement à jamais dans la nuit des temps. Sur ses origines, nous ne disposons, en effet, d'aucun écrit antérieur à l'ouvrage de l'abbé Dubourdieu. Or, cet ouvrage publié en novembre 1922 est basé sur des observations et des témoignages qui remontent, au plus tard, aux années 1870. Si cela est suffisant pour décrire un phénotype relativement précis, les données font cruellement défaut pour tenter de décrire les origines de cette poule. Dans ce domaine, nous en sommes réduits, il faut bien l'avouer, aux hypothèses.
C'est à partir de l'observation de la coloration des pattes (coloration noire avec une légère transparence jaunâtre) que l'abbé Dubourdieu, un passionné d'aviculture, a formulé l'hypothèse de l'origine de la poule landaise comme étant le résultat d'un métissage entre la poule arabe (poule grise à pattes jaune-orangé) et la "vieille poule espagnole" (noire avec des oreillons blancs). Ce mélange de sang se serait produit durant l'invasion de l'Espagne, puis son occupation par les Maures. On en trouverait la trace dans l'actuelle poule castillane, une poule noire, légère, élégante, active et vigoureuse aux oreillons blancs et aux tarses noirs.
L'hypothèse est loin d'être farfelue. Les invasions -et plus généralement les grands flux migratoires- ont entraîné le métissage de bien des races animales domestiques et notamment de celles qui accompagnaient les armées (chiens, chevaux). Et Marcel Dubourdieu d'expliquer : "Les Maures emmenaient avec eux tout ce qu'ils pouvaient piller et surtout ce qui, dans leurs rafles, constituait les provisions du garde manger. Il n'est pas difficile de comprendre comment la race espagnole pénétra et se répandit en France avec l'envahisseur".
Ainsi, la poule du Maghreb se serait métissée d'abord avec la poule espagnole, puis, vraisemblablement, dans le bassin aquitain (mais l'abbé Durbourdieu n'aborde pas le sujet) avec des poules autochtones. Le résultat aurait été cette poule noire que les anciens décrivaient comme sauvage, rustique, vive, alerte et rusée(1).
Encore faut-il expliquer pourquoi la poule landaise semble s'être exclusivement cantonnée dans les territoires landais. Les Arabes ayant parcouru un vaste territoire jusqu'à Poitiers à l'ouest et Troyes à l'est, on devrait logiquement retrouver des poules présentant un phénotype très ressemblant bien au-delà du département des Landes et du sud de la Gironde. Or, cela ne semble pas être le cas, en dehors de deux races géographiquement et morphologiquement assez voisines (la Caussade et la Gasconne) et deux races géographiquement plus éloignées : la Bresse noire et la Castillane déjà citée.
Pour Dubourdieu, ces races ont effectivement des origines communes avec la Landaise, simplement cette dernière "ayant conservé une plus forte dose de sang indigène, le facteur qui, incidemment, est venu opérer sur ce sang, n'a fait que laisser des traces, sans détruire ou annihiler, modifiant seulement à peine des caractères essentiels". Ainsi s'explique la couleur unique des pattes de la poule landaise : "un revêtement noirâtre laissant entrevoir le jaune en transparence", alors que les pattes des cousines gasconnes et du Tarn-et-Garonne restent désespérément grises, même si leur conformation générale est à peu près analogue.

Géographie de la poule landaise

Pourquoi la poule landaise a-t-elle reçu -et surtout conservé- cette "plus forte dose de sang indigène" ? Pour l'abbé Dubourdieu, une fois les Maures chassés de France et refoulés de l'autre côté des Pyrénées, des tribus dissidentes se seraient fixées dans l'aire géographique qui va, en gros, du Marensin au Bazadais. Elles auraient longuement séjourné dans cette région car elles n'y étaient guère inquiétées.
On imagine, en effet, aisément que ce territoire pauvre et inhospitalier, essentiellement constitué de landes rases et de marécages, ne leur était guère disputé. Leurs poules, toujours selon Dubourdieu, ont ainsi eu tout le loisir de croître et de se multiplier. Et comme les Maures ne se hasardaient guère dans les régions plus riches, aux populations plus denses et dotées de places fortes en plus grand nombre comme la Chalosse, les parties plus accidentées de la Gascogne et la Guyenne, cela a permis aux autres races voisines de conserver, malgré des origines communes, leur phénotype spécifique. Ainsi, la Caussade vivant dans un pays accidenté (Tarn-et-Garonne) est restée plus petite que la Gasconne des plaines fertiles de la Garonne. En clair, ces poules n'ont pas reçu assez de sang arabo-espagnol pour avoir les pattes gris-jaune de la Landaise, mais suffisamment pour lui ressembler beaucoup !


Aire d'origine de la poule landaise : Pays d'Orthe (Peyrehorade),
landes du Bas-Armagnac, Grande-Lande, Marensin, Léon,
pays de Born, confins du Bazadais.

Les origines de la poule landaise : mythe ou réalité ?

Doter les races domestiques d'ancêtres prestigieux aura été le pécher mignon de bien des zoologues de l'époque. Mis à part quelques ouvrages très généraux sur l'évolution des espèces et quelques traités d'agriculture peu précis et peu détaillés, remontant parfois au seizième siècle ou à la Rome antique, les naturalistes de la fin du dix-neuvième et du début du vingtième -et, à fortiori, les naturalistes amateurs comme Dubourdieu- ne disposaient d'aucun élément écrit pour étayer leurs thèses sur les races domestiques, à l'exception de celles qui ont eu la chance d'intéresser la noblesse (chevaux, chiens courants, etc.). Même si l'idée leur était venue de décrire leurs poules, les paysans landais ne savaient pas écrire !
En l'absence de documents, toutes les spéculations étaient donc permises. En faisant remonter le plus loin possible l'origine des races qu'ils décrivaient ces savants amateurs faisaient d'une pierre deux coups : ils attiraient l'attention sur la race en question et lui conféraient un prestige qui allait forcément rejaillir sur leur propre personne. Ainsi, un éminent cynophile n'a pas hésité à faire du berger picard le descendant du chien des Celtes… Hypothèse reprise dans tous les ouvrages traitant du sujet mais jamais vérifiée. Jamais vérifiée car impossible à vérifier ! Les envahisseurs celtes étaient aussi sûrement accompagnés de chiens que les envahisseurs maures …de poules ! Reste que personne n'a jamais vu, ni décrit ce fameux chien, comme personne n'a jamais vu ni décrit les poules des Maures !
Toutes ces hypothèses doivent donc être prises avec des pincettes. C'est d'ailleurs ce qu'ont fait les contemporains de l'abbé Dubourdieu. En 1924, dans leur ouvrage Toutes les poules et leurs variétés, Blanchon et Delamarre de Monchaux ironisent à propos de la fameuse hypothèse sur les origines de la Landaise : "C'est, comme on le voit, si cette supposition est exacte, une antiquité tout à fait respectable".

Controverse sur l'hypothèse maure …

Pour justifier son hypothèse, Dubourdieu donne une explication historique : "Nul n'ignore, affirme-t-il, qu'au début du VIIIe siècle, les Sarrazins ou Maures, après leur pénétration en Espagne, occupèrent l'Aquitaine et la Gascogne. Lorsque Charles Martel les écrasa à Poitiers en 732, ils étaient déjà, depuis de nombreuses années dans le centre de la Gaule et jusqu'aux confins de la Bourgogne et du Dauphiné". La durée de cette occupation, il l'évalue à "un peu plus d'un demi-siècle".
Cette affirmation mérite d'être nuancée. En réalité, la seule région qui fut occupée par les Maures pendant près d'un demi-siècle est la Septimanie (Languedoc) de 716 à 759. Leur première invasion ayant été stoppée à Toulouse en 1921 et refoulée vers Carcassonne, Nîmes, Orange, Lyon, jusqu'à Sens et Troyes, elle n'a pas touché la région landaise. Même si des raids ont été menés jusque dans des régions voisines (l'Albigeois, le Périgord et le Quercy), il est peu probable que des populations maures aient pu s'installer durablement sur le territoire landais.
La seule invasion du territoire de l'actuelle région Aquitaine se déroulera en 731. Abd el-Rahman franchit les Pyrénées et traverse les Landes après avoir pillé Bayonne et avant de piller Bordeaux. Vaincu, Eudes, le duc d'Aquitaine, doit appeler Charles Martel à son secours. L'invasion sera très brève puisqu'une fois stoppés entre Tours et Poitiers en 732, les Maures sont refoulés vers le Limousin, puis le Périgord, le Quercy, le Toulousain et, finalement, le Languedoc qu'ils occupaient déjà depuis 716.
La présence des Maures en Aquitaine est ainsi due :
- soit aux raids menés à partir du Languedoc -mais il s'agissait de brèves incursions dont l'objectif était le pillage, d'expéditions de razzias toujours refoulées ;
- soit au grand raid de 731-732.
Dans tous les cas, elle n'a jamais été une véritable occupation avec, pour objectif, la fixation de populations importante, d'ailleurs les armées qui ont traversé les Landes et tout le Sud-Ouest n'étaient pas suivies de femmes et d'enfants.
Dans son Histoire des Aquitains, Antoine Lebègue est très clair "pour la première fois, un grand courant de civilisation venu du Sud-Est passe sans laisser de traces dans la région".
Reste que, comme le souligne Dubourdieu, le passage des Maures aura marqué les esprits dans tout le grand Sud-Ouest comme en témoignent bien des noms de famille (Moreau, Maurin , Mora, Dumora) ou de lieux-dits "Sarrazin" ou "Maure", de communes (Sarrazis, Maurens, La Maure, Montmoreau, Fonmoure, Mauriac, Sarrasac).

Les armées maures vivaient de pillage, de rapine. Elles se nourrissaient chez l'habitant. On ne voit pas très bien pourquoi elles se seraient embarrassées de volailles et de troupeaux à leur suite, d'autant plus que leur principale tactique militaire consistait en une guerre de mouvement (attaques fulgurantes et retraites rapides) qui donnait la priorité à la cavalerie légère et une importance considérable à leurs petits chevaux nerveux. S'il est logique que ces derniers aient laissé des traces en se reproduisant avec des chevaux autochtones (le pur-sang arabe sera sélectionné bien plus tard), cela paraît bien moins évident pour les poules.
Certes, les armées d'Abd el-Rahman ne se composaient pas que de cavaliers, mais également d'une grosse infanterie qu'il fallait bien nourrir. Une "intendance" devait suivre les troupes. Mais à supposer que des poules aient été emmenées d'Espagne, une fois l'Aquitaine conquise, la guerre creusant les estomacs, elles devaient être mangées depuis longtemps.
Reste que les relations entre envahisseurs maures et populations locales ne se réduisaient pas à un état de guerre permanent. Autant dire qu'il y avait une place pour le commerce et, plus généralement, les échanges culturels. Il est également certain que des Maures se sont unis à des femmes gasconnes, se sont établis dans la région et y ont fait souche au point d'influencer parfois l'agriculture locale comme ce fût, semble-t-il, le cas en Touraine -à moins que ce ne soit une autre légende- avec la promotion de l'élevage caprin et la fabrication du fameux fromage de Sainte-Maure !

Admettons qu'une variété de poules arabo-espagnoles se soit installée et acclimatée dans la lande gasconne à la suite de l'invasion arabe. Il serait bien plus logique qu'on en retrouvât partout dans le sud de la France, de Poitiers à Troyes -et plus particulièrement là où les Arabes ont séjourné le plus longtemps, soit en Septimanie (Languedoc) occupée sans discontinuité pendant presque un demi-siècle. Or, en dehors de la Landaise au phénotype très particulier (coloration jaune aux pattes et oreillons), Dubourdieu n'accorde des origines arabo-espagnoles qu'à trois autres races : la Gasconne, la Caussade et la Bresse noire. Contre toute attente, les régions d'origine de ces races ne sont pas situées dans la zone majeure d'occupation des Maures, mais dans des régions ayant été seulement victimes de leurs raids. On se demande bien pourquoi la poules arabo-espagnole aurait fait souche dans la vallée de la Garonne et les collines avoisinantes, voire en Lyonnais, mais pas sur les bords de la Méditerranée !

Du désert africain au désert landais ?

De la même façon, pour justifier le fait que la Landaise est la seule à avoir hérité de la couleur jaune des pattes de la poule arabe, Dubourdieu explique qu'elle a reçu plus de sang arabe et pendant plus longtemps parce que des tribus dissidentes arabes se sont fixées durablement dans sa région d'origine. "Nous savons même par des documents historiques ou provenant d'archives régionales, que plusieurs tribus dissidentes s'établirent dans le pays d'Orthe, le Marensin, la Grande Lande, les landes de Gascogne et jusque sur les confins de la Gironde", affirme-t-il. Et cela, sur une longue période (entre le huitième et le quinzième siècle), jusqu'à ce que Ferdinand achève la reconquista !
Il est fort dommage que l'abbé n'ait pas cité ses sources, car il ne reste pas beaucoup de traces de cette fixation de populations musulmanes qui tient plus de la légende que du fait historique brut !
Par contre, il est certain qu'une fois la reconquête espagnole achevée par Ferdinand IV, les Maures ont tenté de s'allier à Henri IV. De la même façon au début du dix-septième, quand Philippe III décide de tous les expulser de son royaume, environ 150.000 musulmans se présentent à Saint-Jean-de-Luz et demandent l'autorisation de passer en France. Henri IV les autorise à traverser le pays, voire même à s'y installer. "Mais c'était à la condition, pour eux inacceptable, qu'ils abjurassent leur foi", précise Jean Sargos dans son Histoire de la forêt landaise.
On notera que s'ils avaient accepté, il n'a jamais été envisagé de les laisser s'installer en Aquitaine, mais au-delà de la Dordogne "afin qu'en mettant deux grosses rivières entre-deux, ils ne fussent pas trop voisins de l'Espagne", précise Scipion Dupleix. D'ailleurs, rien n'a été fait pour les retenir, ni même les inciter à y rester : "Traversant les landes et les contrées voisines des Pyrénées, poursuit l'historiographe officiel de Louis XIII, ils furent quasi tous rançonnés, et volés, et aucuns tués et les plus belles filles violées, et après avoir souffert toutes sortes d'incommodités et d'injures s'en allèrent embarquer ès port de Languedoc pour passer en Afrique". A la lecture de ce témoignage, on imagine mal que des Maures, fussent-ils dissidents, aient pu choisir les Landes comme terre d'accueil !
Et jacques Sargos de conclure : "Point de preuve formelle, dès lors, quant aux velléités landaises des Maures. Seules courent des rumeurs, des interprétations hâtives et tardives qui remontent vraisemblablement au XVIII siècle".

En réalité, les Landais ont toujours été considérés comme un peuple à coloniser, des sauvages paresseux, peureux et lâches, des barbares vêtus de peaux de bêtes, vivant à la limite de l'humanité et de l'animalité dans des tribus arriérées, sur une terre nue et désolée, loin de toute civilisation (2) ! De la même façon que le désert africain avait produit l'Arabe, il était naturel que le désert des Landes produisît un "indigène" très ressemblant : le Landais !
En 1911, Albert Gaillard, dans son ouvrage La baronnie de St Magne, cite les propos tenus par le maire de la commune en 1818. "Les hommes qui composent cette population paroissent d'une origine très ancienne, et leur race être un mélange de la Celtique avec un rameau Sémitique ou Arabe. Une grande partie de nos Landes fut le refuge de la plupart de ceux qui échappèrent au massacre de Poitiers. Témoin, quoiqu'on en dise, cette race de petits chevaux arabes si connus sous le nom de chevaux des landes". En 1837, François Jouannet écrivait : "Les landescots ont quelque chose de l'Arabe au physique et au moral" (3).
La tentation aura certainement été forte de faire de la poule du désert landais, la descendante directe de la poule du désert africain !

L'hypothèse de Dubourdieu est loin d'être fondée du strict point de vue historique. Mais, même si on l'accepte, elle soulève autant de questions qu'elle n'en résout car on peut se demander pourquoi on ne retrouve pas en Languedoc, et encore plus en Espagne occupée pendant plusieurs siècles, l'équivalent de notre Landaise. Parmi les races espagnoles, Dubourdieu considère la Castillane noire comme présentant le phénotype le plus proche. Or cette poule légère et active, une des deux plus anciennes races espagnoles décrites à fin du dix-neuvième siècle, a les oreillons blancs et les tarses noirs !

La piste romaine

Qu'en est-il exactement de cette poule arabe ou poule africaine que Dubourdieu décrit comme "une volaille grisâtre, à patte d'un jaune orange" ?
Selon Dr César Bisimwa, "il n'existe pas de races autochtones africaines à proprement parler mais des populations" à plumage varié avec quelques traits communs tels qu'un petit gabarit. Les poules pèsent 1,2 à 1,8 kg ; elles sont de bonnes couveuses et d'excellentes mères (…) Elles sont très rustiques et cette qualité particulière leur permet de survivre dans les villages sans aucun soin particulier (…)"
Comment Dubourdieu a-t-il pu connaître cette fameuse poule arabe ou poule africaine qu'éleveurs et juges des expositions avicoles ne connaissent pas ?
Les seuls écrits mentionnant des poules africaines remontent à l'Antiquité romaine. Dans son Traité de l'agriculture, Varron explique qu'il existe à Rome trois espèces de poules : les poules domestiques, les poules sauvages et les poules africaines. Et il précise : "Les poules sauvages sont rares à Rome, où on ne les voit guère que dans des cages. Elles ressemblent pour l'aspect, non à nos poules domestiques, mais plutôt aux poules africaines ; elles ne pondent et n'élèvent de poulets que dans les bois et sont stériles dans nos villas". Quant à cette fameuse poule africaine, elle ressemble étrangement à la pintade : "Les poules africaines que les Grecs appellent méléagrides, poursuit Varron, sont de grande taille, ont le dos rond, le plumage varié".
Columelle cite, lui aussi, la poule africaine ou poule numidique "qui ressemble à la pintade (poule méléagride), si ce n'est que sa huppe et sa crête sont rouges, au lieu d'être bleues, comme celles de cet oiseau". D'après son nom, cette poule serait donc originaire de l'antique Carthage et de la côte Est de l'Algérie. Mais selon François-Dominique Fournier, Columelle n'avait pas observé ces oiseaux d'assez près pour s'apercevoir que la première était la femelle et la seconde le mâle d'une seule et même espèce. Ainsi, la poule africaine ne serait qu'une pintade !
Dubourdieu, prêtre et donc latiniste, connaît certainement ses classiques. De ses lectures aurait-il gardé le vague souvenir d'une poule arabe à l'aspect proche de la pintade, poule sauvage ou semi-sauvage (à tel point que Varron préconisait l'usage de filets au-dessus des poulaillers) qui ressemble tant à la description que les anciens Landais donnaient de la poule "sauvage" jamais totalement domestiquée, couchant perchée dans les arbres, pondant et nichant dans les buissons, habile à déjouer les pièges du renard ..? De là à imaginer que quelques siècles plus tard cette poule arabe a colonisé les Landes …

Jaune-citron et jaune-orange !

Difficile, dans ces conditions, de rendre compte de la spécificité de la Landaise : ce jaune sous le gris des pattes qui résulte certainement d'un croisement entre une poule aux pattes jaunes comme la Leghorn et d'une poule aux pattes grises comme la Bresse noire, au point que certains ont envisagé que notre bonne Landaise ne soit que le produit, au début du siècle dernier, d'un tel mélange, voire de la Leghorn avec la Gasconne ou la Caussade.
D'ailleurs, Dubourdieu s'empresse de démentir cette hypothèse qu'il pressent. Il reconnaît "qu'on trouve fréquemment, dans la Grande-Lande surtout, des volailles tout à fait dans le type et la couleur de la Landaise noire ou grise, mais dont les pattes sont complètement jaunes". Mais il explique aussitôt que ce jaune "se rapproche beaucoup comme nuance du jaune de la poule africaine qui est d'une teinte orangée, tandis que le jaune de la Leghorn est plutôt jaune citron". De plus, "cette coloration de la Landaise est antérieure à l'introduction de la Leghorn en France".
En réalité, il semble bien que la Leghorn était déjà très répandue en France à la fin du dix-neuvième. Mais peu importe puisqu'il existait déjà en 1600, sous Henri IV, des poules aux pattes jaunes. Dans son livre Le théâtre d'agriculture et le Mesnage des champs, Olivier de Serres expose ses critères en matière d'aviculture, critères qui reprennent globalement ceux de Columelle (à l'exception de la couleur des pattes qui n'était pas précisée par ce dernier) : "La plus souhaitable race de poules est celle qui, avec la délicatesse de la chair, fournit des œufs en abondance la plupart des saisons de l'année". Ces qualités se retrouvent plus particulièrement dans les poules de corpulence moyenne, "noires et tannées" (Columelle dit : "rouge ou brun"). Et il ajoute que la crête pendante sur le côté "est signe certain de fertilité" comme la couleur jaune des jambes est "signe de délicatesse et santé de la chair". S'agissant du coq, il doit, lui aussi être de taille moyenne, de couleur noire ou rouge sombre, avec des pattes de couleur jaune, les yeux noirs et les oreillons larges et blancs. Jean-Claude Martin, Président d'honneur du B.C.F., commente ainsi cette description : "une poule commune au plumage rouge et noir, à la crête tombante et aux pattes jaunes, nous fait penser à la Leghorn, originaire d'Italie, d'autant plus que nous sommes dans le sud de la France".

Croisements ou impasses ?

Leghorn ou non, africaine ou non, espagnole ou non, il n'est donc pas impensable que des poules noires de plumage et de pattes se soient croisées avec des poules noires aux pattes jaunes et que le résultat de ce croisement ait donné la Landaise. Il n'est pas impensable non plus que cette poule ait conquis les Landais, parmi d'autres variétés, par le jaune de ses pattes, sa corpulence moyenne, sa couleur noire, signes annonciateurs de "délicatesse de la chair".
Le croisement leghorn-bresse noire a naturellement été tenté par des éleveurs qui espéraient retrouver le type landais. "Le produit n'a rien à voir avec la Landaise, explique René Jourdan que nous présenterons plus loin. On ne retrouve pas notre poule !" Un verdict sans appel !
Un autre type de croisement a été tenté entre des Landaises quelques poules gasconnes chez lesquelles étaient "ressorties" des pattes jaunes. Résultat : "des poules au corps plus court, plus lourdes et plus fortes". L'expérience nuit à la finesse et à l'élégance de la poule landaise.
Ces témoignages incitent à rejeter l'hypothèse d'un simple croisement Leghorn-Bresse ou Leghorn-Gasconne.
Il est bien difficile de répondre à toutes ces questions qui mériteraient des recherches bien plus approfondies et, en l'absence de preuves irréfutables, chacun se fera sa propre idée. Toutes ces hypothèses se fondent sur le phénotype. La réponse est certainement dans le génotype et les progrès de la génétique.

Quoi qu'il en soit, si l'hypothèse de Dubourdieu doit être prise avec quelques précautions, elle n'en aura pas moins contribué à la reconnaissance d'une race, là où bien d'autres ont échoué, avec pour conséquence la disparition pure et simple !

Standard et premières tentatives de sélection

C'est à partir de la deuxième moitié du dix-neuvième siècle que l'on commence à vraiment s'intéresser aux races domestiques. Avec la noire défaite de Sedan, la perte de l'Alsace et de la Lorraine, la France subit un énorme traumatisme. Le nationalisme exacerbé qui en résulte ne sera pas sans conséquences. Il se manifeste dans bien des domaines, y compris en matière de zootechnie ! Les meilleurs zootechniciens précisent les notions de race. Chaque pays veut démontrer que les siennes sont les meilleures -et les plus anciennes.
C'est ainsi que les premières tentatives de classification sont menées, par des cynophiles notamment, jusqu'à la première guerre mondiale, parfois plus tard encore. Par la suite, la rédaction de standards définissant des caractéristiques morphologiques précises propres aux différentes races, permettront leur sélection. L'aviculture n'échappe pas à la règle : comices agricoles, expositions avicoles, permettront de sélectionner les meilleurs sujets et de fixer les caractéristiques des principales races.

Pour la poule landaise, le mérite de ce travail revient aussi à l'abbé Dubourdieu. Son ouvrage reste le premier et le seul document décrivant le phénotype de la poule landaise tel qu'il se présentait à la fin du dix-neuvième siècle. Il a été le premier à identifier une population de poules présentant les mêmes caractéristiques physiques et répartie sur une aire géographique précise : le département des Landes, le Bas-Armagnac et le sud de la Gironde.
Lors de ses déplacements dans le Bazadais et un peu au-delà (4), il recherche des spécimens dans les fermes et entreprend, pendant trois ans, un travail de sélection sur le phénotype qu'il a pu observer : "une variété de poulets noirs ou gris, d'un type bien défini, se reproduisant très bien malgré des croisements antérieurs, et restant toujours ce qu'on le voyait, il y a une cinquantaine d'années, et tels que les vieux d'alors affirmaient les avoir toujours vus". Devant quitter la région, il doit cesser son travail de sélection, mais conserve quelques exemplaires qu'il expose et finit par céder à M. J. Fort du domaine de Villemarie à La Teste (Gironde).
En 1922, l'abbé Dubourdieu rédige un projet de standard dans l'ouvrage qu'il consacre à la poule landaise (5). Peu de temps après, en février 1923, au Grand Palais des Champs Elysées, dans le cadre d'une exposition organisée par la Société centrale d'Aviculture de France, il présente des sujets noirs et décrit quels sont, selon lui, les caractères typiques de la variété. Ces conseils permettront d'élaborer un standard qui sera publié le 15 février 1923 dans la revue La vie à la campagne et adopté par la Fédération des Sociétés d'Aviculture le 15 mars 1923. Ce standard est encore en vigueur de nos jours.

Alors que bon nombre d'éleveurs cherchent à augmenter la taille de la Gasconne et de la Caussade par divers croisements avec notamment des coqs Bresse noire, Dubourdieu, lui, décrit une poule de taille moyenne, au squelette léger et aux pattes fines. Il va ainsi à contre-courant des démarches qui consistent "à intensifier les productions avicoles par de gros rendements obtenus à l'aide de méthodes perfectionnées" (6). D'emblée, la Landaise s'affirme comme une poule réfractaire à l'industrialisation et à l'élevage intensif.

Dans le sillage de Dubourdieu

En 1921, l'abbé Dubourdieu cède à M. J. Fort du domaine de Villemarie à La Teste (Gironde), les spécimens qu'il a rapportés du Bazadais afin qu'ils servent de point de départ à un projet d'élevage pour la ponte et la production de viande.
En 1936, Mme Lemosy d'Orel, avec les conseils de Dubourdieu, se lance, à Saint-Sever, dans la sélection de la race. Elle obtient un diplôme d'honneur au Centre rural de l'exposition Universelle de 1937 à Paris, puis deux premiers prix en 1938 et 39 aux Expositions Avicoles Internationales de Paris.
Quelques autres éleveurs se sont-ils intéressés à cette variété de poules ? Certainement, mais pas en grand nombre. Comme pour d'autres races domestiques (les chiens, notamment), la seconde guerre mondiale et son cortège de pénuries sonnent le glas de bien des démarches de sélection entreprises à la fin du dix-neuvième et au début du vingtième siècle.
Depuis, même si les vieux Landais se souviennent de cette poule "sauvage" sans être, pour autant, capables de définir clairement ses caractéristiques, la race a quasiment disparu au profit de poules plus productives et au développement plus rapide !

La redécouverte de monsieur Jourdan

Il faudra attendre 1972 pour qu'un agriculteur, René Jourdan, s'intéresse à cette race. "C'est en lisant des extraits de l'ouvrage de l'abbé Dubourdieu dans une revue avicole que tout a commencé, explique-t-il. Il y avait le standard de la Landaise ainsi qu'une gravure la représentant. Cela m'a rappelé les poules que je voyais dans les fermes quand j'étais gamin. Certes, il y en avait de toutes les variétés et, pour être honnête, je ne me rappelais pas la couleur des pattes, mais les poules noires avec des oreillons jaunes dominaient nettement. Je me suis dit qu'il fallait retrouver cette race !"
René Jourdan se passionne depuis longtemps pour d'élevage et plus particulièrement l'aviculture. Il n'est pas du genre à faire les choses à moitié. Il bat la campagne pour retrouver des spécimens du type décrit par l'abbé Dubourdieu, visite les fermes … En vain ! Les poules de son enfance ont disparu, remplacées par des Leghorns américaines, des hybrides. En désespoir de cause, il se dit que le croisement entre Leghorn noire aux pattes jaunes et Bresse noire aux pattes grises peut donner quelque chose qui ressemble à la Landaise. Il tente même l'expérience qui se solde par un échec : le produit du croisement n'a rien à voir avec l'original !
C'est peu de temps après qu'il découvre et récupère dans une ferme du Gers, La Tuilerie à Aubiet, près d'Auch, des poules présentant "à s'y méprendre" le même aspect général que la Landaise avec, en prime, son élégance, sa couleur noire et ses oreillons jaunes. Les seules différences viennent des pattes entièrement jaunes et des yeux clairs.

La piste Bresse-Espagne-Maghreb

Avec ces spécimens, René Jourdan va pouvoir vérifier son hypothèse sur les origines de la poule landaise. Ayant lu qu'autrefois des oies du Bourbonnais étaient engraissées dans le Sud-Ouest, ayant, d'autre part, observé que le dindon noir du Gers est presque identique à celui du Bourbonnais, il s'était demandé si la poule landaise n'était pas le produit d'un croisement entre la Bresse noire et une poule espagnole jaune aperçue sur une affiche et copie conforme de la Landaise, à l'exception toutefois des oreillons rouges et des pattes entièrement jaunes.
En 1973, René Jourdan tente l'expérience : il croise un coq Bresse noir avec ses quatre poules. Le résultat est à la hauteur de ses espérances : quelques sujets ont les pattes entièrement jaunes mais, à 95%, il en ressort des Landaises parfaitement typées aux oreillons jaunes clair, aux pattes présentant la fameuse transparence jaune sous le noir, avec de l'ocre dessous les doigts et l'œil bien foncé. Ses quatre poules retrouvées dans le Gers, plus un coq du même type et le Bresse noir seront à l'origine de la renaissance de la Landaise.
"Quand j'ai exposé mes poules à Paris, un juge a refusé de les juger au motif que la race était considérée comme disparue, ironise René Jourdan. Mais les autres ont bien vu qu'elles étaient parfaitement conformes au standard et, par la suite, je n'ai plus rencontré de problèmes. M. Capelle qui connaissait bien les vieilles races locales et prenait beaucoup de plaisir à les juger aura été le premier les reconnaître".

Une renaissance landaise

Dans le domaine de la sélection, René Jourdan ne rencontrera pas de grandes difficultés si ce n'est des oreillons sablés de points rouges (mais assez rarement et surtout chez les coqs). Certains sujets présentent des oreillons un peu trop jaunes, d'autres des yeux un peu trop clairs, mais le type et la couleur des pattes auront été "impeccables du premier coup" !
Entre 1973 et 1980, René Jourdan produira environ 2 à 300 poules qu'il exposera dans les concours avicoles et diffusera auprès de ses amis éleveurs (une bonne vingtaine) afin de perpétuer la race. C'est ainsi que ses produits constitueront le point de départ de toutes les tentatives connues de sélection sur la race durant ces trente dernières années. A quelques exceptions près, il n'y aura pas de programme de sélection dans de grands élevages, et la race survivra, ici et là, en petites structures (un coq et trois poules) chez des particuliers. En fait, la race ne présente pas un grand intérêt pour les éleveurs. Le poulet landais est plutôt petit, même s'il est rond, charnu et très savoureux. Il est aussi plus long à venir et rebelle à l'élevage intensif, donc peu rentable quand on ne privilégie pas la qualité.
René Jourdan cessera son élevage en 1980, à la suite de grosses désillusions : son poulailler est victime de vols puis dévasté par des chiens. Pourtant tout n'est peut-être pas fini pour autant. Le démon de l'élevage est certainement plus fort que l'adversité. "En ce moment, je recommence élever, mais pas de Landaises, confesse celui qui restera à jamais comme, dans le sillage de l'abée Dubourdieu, le "redécouvreur" de la vieille poule des Landes. J'ai repris ma première passion, celle des oies et des canards. Je reprendrais bien quelques Landaises, mais il faudra que ça soit un grand coup de cœur !"

Actuelle Landaise

Dès 1974-75, le Docteur Ribéreau-Gayon du Conservatoire des races d'Aquitaine acquiert chez René Jourdan des sujets qui seront à l'origine de l'élevage de la ferme conservatoire de Leyssart et, en partie, de celui de l'Ecomusée de Marquèze.
A Parempuyre, Alain Dabé sélectionne la Landaise depuis 1985. "Je me passionnais pour l'aviculture depuis cinq ou six ans quand j'ai connu cette race dans les expositions avicoles grâce à René Jourdan, explique l'éleveur médocain. Comme tout le monde, j'ai commencé avec ses poules : deux poules et un coq". Il lui faudra quelques années avant de fixer le jaune de l'oreillon et de limiter l'apparition d'un "vague jaune", de couleurs "nacrées bleu ou carrément blanches". D'ailleurs, la couleur de l'oreillon est toujours précaire puisqu'elle ternit en période de ponte. Plus difficile encore aura été l'obtention d'un œil bien foncé et non brun orangé ou brun clair. "On remarquera au passage, explique Alain Dabé, qu'une nourriture à base de maïs renforce le jaune des pattes et des oreillons. La différence est vraiment sensible quand on compare des lots de poules nourries au maïs avec d'autres nourries au blé". Autre défaut constaté : l'apparition de plumes rouges au camail. Le coq bresse noir utilisé par René Jourdan était-il porteur de cette couleur ? Quoi qu'il en soit, la sélection porte ses fruits : "Au début, j'avais environ 90 % de déchet. Aujourd'hui, nous obtenons 100% de landais -même si, comme pour toutes les autres races, il y a toujours quelques petits défauts. Le type est désormais fixé. Mais attention : si on arrête de sélectionner, on finit par perdre le jaune de l'oreillon ! Si les quelques éleveurs qui s'intéressent à cette race laissent tomber, la poule landaise retournera aux oubliettes !"

En 1987, un autre passionné se lance à son tour dans le sauvetage de cette race à la ferme-conservatoire de Leyssart, avec l'appui du Conservatoire des Races d'Aquitaine.
Tout commence par une visite chez Guy Ribéreau-Gayon. "Au départ, nous devions nous retrouver pour aller voir des porcs gascons, se souvient Dominique Massoubre, mais il m' a montré les poules landaises qu'il tenait de monsieur Jourdan. Comme il avait des œufs, je suis reparti avec deux douzaines que j'ai aussitôt mises à couver sous une poule". De ces œufs naîtront quatre poules et un coq bien typés qui constitueront la base de l'élevage de Leyssart.
Au début, Dominique Massoubre rencontre de nombreux problèmes liés à la consanguinité. Ses Landaises sont de santé fragile. Leur fécondité est mauvaise. Les poussins meurent jeunes. Les adultes restent fragiles et vulnérables aux parasites. L'emploi de vermifuge est indispensable pour les protéger.
"Les animaux que nous confions pour sauver la race étaient tellement fragiles qu'il s'en perdait beaucoup mais, petit à petit, les choses se sont améliorées avec la multiplication du nombre de reproducteurs. Ca a commencé à bien marcher quand nous avons atteint les quatre-vingts poules et vingt coqs".
Les efforts de Domimique Massoubre qui avait misé sur un élevage en liberté avec un maximum de reproducteurs portent enfin leurs fruits. Les poules deviennent progressivement moins délicates.
Par contre, le travail de sélection sur le phénotype reste, lui, plus aléatoire. L'apparition de plumes rouges parmi les lancettes du camail sera longue à résorber et une partie des petits ne sont toujours pas parfaitement typés. S'il est relativement aisé d'obtenir de beaux oreillons jaunes chez les coqs, il en va tout autrement chez les poules (sauf celles qui sont restées très consanguines) dont le jaune a tendance à ternir et à virer au blanc quand elles commencent à pondre. Mais petit à petit, les choses progressent.

On notera que, si elles ont toutes les deux été couronnées de succès, les démarches de Dominique Massoubre et d'Alain Dabé sont diamétralement opposées. Le premier a misé sur un élevage en totale liberté, en partant du principe que les coqs vont naturellement s'accoupler avec les poules les plus éloignées génétiquement. Le second a opté pour une maîtrise de la reproduction par couples comme le font les colombophiles, un marquage des petits, une gestion rigoureuse des accouplements, des lignées et de la consanguinité dont il faut "user mais ne jamais abuser", tient-il à préciser.

Au début des années 90, Dominique Dubuc au Conservatoire Avicole de Puyobrau se lance à son tour dans l'aventure landaise à partir de poules de l'Ecomusée de Marquèze. A Panjas, dans le Gers, Guy Vernhes prolonge, le travail que M. Capelle de Montauban avait entrepris avec des poules de la ferme de Leyssart à la fin des années 90. Sans oublier le travail de Françoise Vincent à l'Ecomusée de Marquèze à partir de sujets de Guy Ribéreau-Gayon et d'Alain Dabé.

On peut à l'heure actuelle évaluer le cheptel à environ 150 à 200 poules et une cinquantaine de coqs.

On notera également le soutien à ce travail qu'apportent deux associations :
- le Gasconne-Club 39, rue Joseph Marignac - 31300 Saint-Martin du Touch
- le Conservatoire des races d'Aquitaine



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© Joël HERREROS
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Coq et poules landais, tels qu'ils se présentaient dans les années 1920 :


COUSINS, COUSINES ...

Coq gauloise bresse noir


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La poule bresse gauloise noire a le plumage entièrement noir avec des reflets verts, l'oreillon blanc et les pattes bleues. Variété très rustique voire "sauvage", au caractère et au comportement proche de celui de la Landaise. Poids moyen : 2 à 2,5 kg pour le coq, 2 kg pour la poule.

Coq et poule caussade


Droits réservés

Cette poule porte le nom de la ville de Caussade dans le Tarn-et-Garonne. C'est une volaille de petite taille (coq : 1,5 à 2 kg ; poule :1,5 kg), rustique, alerte, aimant la liberté.

Poule Leghorn noire


Droits réservés

Poule originaire d'Iltalie, baptisé Leghorn (nom anglais du port de Livourne) par les Anglais. Coq 2 à 2,7 kg ; poule: 1,8 à 2,4 kg

Coq et poules gasconnes


Poule de taille moyenne aux formes assez arrondies, originaire du Sud-Ouest et de la vallée de la Garonne. Plumage noir, oreillons rouges et tarses noirs. Coq : 2,5 à 3 kg ; poule : 1,8 à 2,3 kg.

Castillane noire
(Castellana Negra)


Droits réservés

Poule espagnole au plumage noir, aux oreillons blancs et aux tarses noirs sélectionnée à partir de poules noires locales. Poids moyen : 2,1 kg pour le coq, 1,8 kg pour la poule. Volaille légère, élégante, active et vigoureuse. Certains font remonter ses origines aux poules emmenées par les Arabes en Espagne.

 


NOTES

(1) Duboudieu emploi le terme "aouarte" censé désigner, en gascon, une poule sauvage : "Les fermiers landais la désignent souvent sous le nom de Poule aouarte". Nous n'avons trouvé, nulle part, trace de ce mot, ni dans les dictionnaires gascons et occitans, ni dans les souvenirs des vieux landais.

(2) Je ne résiste pas au plaisir de reprendre ici une citation tirée de l'ouvrage de Jacques Sargos. Il s'agit d'une description du berger landais donnée en 1849 par un certain Gabriel Bouyn.
"Le landais pasteur, être éminemment paresseux, peureux et lâche, préfère de beaucoup le métier inactif qu'il emploie, et qui lui rapporte peu, à la vie de travail qui le ferait subsister avec aisance. On peut, sans exagérer, dire que cet être, à la mine livide et féroce, ne pense ni ne réfléchit. On peut soutenir que tous ses mouvements sont purement instinctifs. Juché sur ses tchankes, il ne sait faire que l'ouvrage des femmes. Il ne rougit point de tricoter. Complètement dépourvu d'intelligence, passé par ses fonctions à l'état de brute, il représente probablement l'intermédiaire tant cherché de l'homme et du singe. Sa constitution physique tient du crétinisme. On peut en trouver les causes dans la perversité de ses mœurs, qu'on ne pourrait trouver plus abominables en aucun pays ni en aucun temps. Du reste, s'il est devenu crétin, par état et par vice de conformation, il est cruel, barbare et sans pitié. Gardez-vous de l'offenser : il devient alors une bête fauve, n'épargnant ni les femmes, ni les enfants".

(3) Citations tirées de l'Histoire de la forêt landaise, par Jacques Sargos.

(4) On notera que les investigations de Dubourdieu ne dépassent guère la région bazadaise : ses souvenirs d'enfance chez un "camarade des landes du Bazadais", puis son séjour de trois ans dans "une région pas très éloignée du bazadais (30 kilomètres environs". La poule qu'il décrit est, avant tout, une poule bazadaise, même s'il affirme qu'on retrouve ce type partout dans les landes jusqu'au Marensin.

(5) La race de volaille Landaise, Marcel Dubourdieu, Paris 1922

(6) Toutes les poules et leurs variétés. Blanchon et Delamarre de Monchaux 1924